mardi 7 décembre 2010

Chaviré par le mois des nuées

Novembre et moi, on ne s'est jamais très bien entendu, aussi loin que je me souvienne...
Enfant je déchargeais allègrement sur mes proches, puis il m'a fallu apprendre à garder ça un peu plus pour moi, en faire une brique de mon puits.
S'y mêlent une légère incertitude quant au bien-fondé de célébrer un rendez-vous manqué: mon entrée dans le monde – qui s'est renouvelé tout au long d'un flottement délectable parsemé d'impacts (risques inhérents au pilotage de nuage); des genoux qui tirent un peu de l'année parcourue, raidissant la foulée, accentuant l'infime inquiétude du marcheur dans l'obscurité, abandonné à son insouciance et espérant qu'elle lui épargnera l'invisible obstacle; et une carcasse, peu protégée contre les mordillements du froid, qui s'essouffle à ranimer son propre foyer.
« Mal si tendre », aurait presque dit Camille, que je travaille à me laisser travailler, à savourer - dans le sens de « s'imprégner d'une sensation », et qui pourtant chaque année me prend au dépourvu... Encore une fois je n'y aurais vu que du feu du vent, et par la porte d'une petite fatigue se sont engouffrés une énigme insoluble, une rafale du vrai monde avec des vrais gens (prends ta gifle de naïveté), quelques inquiétudes voleuses de sommeil, et s'est échappée une paire de mes peu nombreuses racines (l'une fragile et précieuse, l'autre inconnue et troublante d'insensibilité).
Alors je m'enduis de cette lenteur, je m'emplis de vacuité, je me laisse ballotter quelques centimètres au-dessus du sol, et je démantèle minutieusement les craintes recroquevillé à la chaleur des braises rougeoyantes, dans l'attente patiente et confiante du moment où le feu de lui-même repartira – où lumière et chaleur émanent de soi. Temps de repos: le conteur inspire avant de replonger... « Le fait est fortuit et sans importance, que ce soit moi le rédacteur de ces lignes ou vous le lecteur » écrit Borges, alors si l'univers avait quelque chose de particulier à exprimer ces dernières semaines il l'a fait murmurer par d'autres mains et peut-être entendre par d'autres yeux...
Et un matin je me lève et laisse tout derrière -
Tout sauf tout -
Tout sauf moi.

7 commentaires:

  1. Camille l'écrivaine malgré elle7 décembre 2010 à 22:51

    j'aime bien quand tu me cites car on dirait que je suis une grande Ecrivaine mais j'aimerai bien comprendre moi-même mes citations !
    je crois que je commence à mieux comprendre pourquoi le paquet n'est arrivé qu'en décembre, un mois en effet plus propice pour les cadeaux... enfin, malgré la proximité du Père Noël au pôle Nord, je ne sais si tu auras quelque chose sous ton sapin cette année, surtout si les norvégiens apprécient les bons petits mets français avant toi !

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  2. Ohoh... En fait, même si je te porte en grande estime, c'est Camille la chanteuse que je citais.
    Mais tu aurais aussi très bien pu le dire :)
    Et ce soir j'ai partagé le fromage, qui malgré un goût assez prononcé, a été fort apprécié!

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  3. Mais novembre peut voir une certaine douceur, oscillant doucement entre la chaleur accablante de l'été et le froid mordant de l'hiver. Les premiers flocons immaculés se atterrissent délicatement, déposant un manteau ouaté sur le monde. Il est alors temps de regarder par la fenêtre, de sourire en déposant un voile de buée bleutée sur la vitre. Puis vient l'accalmie. Sortir, offrir son minois à un vent tiède qui, joueur, décoiffe ses cheveux. Respirer un air doux, se détendre et laisser la torpeur s'insinuer dans son corps, sa vie. Rentrer à l'intérieur, retrouver sa gaieté, et rire de tout...

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  4. C'est vrai que toi aussi tu as eu de la neige...
    Heureusement que Novembre voit de la douceur! C'était uniquement de mon novembre dont je parlais, qui malgré quelques rudesses, m'a souvent vu sourire - ni vent tiède ni air doux, mais "la gaieté d'enfant qui coule toujours sur les petits cailloux", comme dit Henri Vincenot.

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  5. une petite soeur rassurée au sujet du bien-être psychologique de son grand frère11 décembre 2010 à 11:59

    au fait, tout est dans le pseudo...

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  6. c'est vrai que tu me prenais pour christophe ??

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  7. Ben nan... Vous vous ressemblez quand même pas du tout...

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