dimanche 29 août 2010

Prins Karls Forland trip


































Ma première sortie en-dehors du fjord! Une grosse heure de bateau sur une mer clémente pour rejoindre cette île hérissée de montagnes acérées. La pointe nord expose ses grandes falaises, abritant des colonies surpeuplées d'oiseaux: la fertilisation est tellement intense que les couleurs sont irréelles, et le sol est un matelas de mousses d'une vingtaine de centimètres d'épaisseur qui accueille chaque pas avec une moelleuse tendresse.
Quelques kilomètres plus au sud nous rencontrons une bande de phoques se prélassant en grognant sur la plage – les plus curieux viennent pointer leur museau autour du bateau sitôt le moteur coupé...
Et un peu plus loin nous entrons dans la Richard-laguna: une dizaine de kilomètres du nord au sud pour à peine un kilomètre au plus large, dont l'unique entrée s'ouvre sur une vingtaine de mètres et un mètre de profondeur à marée haute... Le courant est impressionnant dans la passe, puis tout devient calme et limpide, le fond sableux orné d'arabesques de vers fouisseurs. A terre, l'activité du permafrost a dessiné un mandala de pierres géant, dédale de roches effritées et de terre spongieuse.

L'automne


















C'est l'automne qui arrive, et roussit le monde de ses couleurs de feu! Les dernières fleurs fanent, les mousses tirent sur le vert pâle, l'herbe jaunit, parsemée de graminées bordeaux, et les petites feuilles s'empourprent... Le duvet des jeunes bernaches nonnettes s'amasse autour des tiges drues, tâches blanches bercées par la brise, et la neige virevolte de plus en plus souvent, saupoudrant les crêtes des montagnes.

Taxi-Corbel




Mon trajet de prédilection (vitesse x4), quasi-quotidien entre fin juin et début août pour transporter des scientifiques ou du matériel à Corbel, les bâtiments à 5 km à l'est du village, au pied du glacier Austre Lovénbreen. Un grand souffle d'air frais dans les pensées!

"Vaut mieux se remplir le plus qu'on peut

La boite crânienne de belles images..."

samedi 28 août 2010

Fin de journée


Dans la nuit de mardi à mercredi, un tout petit morceau du bas du soleil est passé derrière un tout petit morceau du haut d'une montagne...

mardi 24 août 2010

La face cachée


Jeudi soir, seconde tentative pour retrouver l'ancre: Christian m'accompagne à l'île de Gerdøya où, grâce aux indications des perdeurs - et à un peu de chance (l'eau est bien trouble, et de grandes algues recouvrent le sol), l'ancre est récupérée par 4 mètres de fond après une brève plongée. Profitant des conditions tropicales, nous mettons le cap sur l'ilot de Jutta, près duquel trône cet iceberg nonchalant: 4 mètres au-dessus de la surface, et l'air relativement stable.
La visibilité est limitée: les glaciers drainent toujours beaucoup de sédiments dans le fjord... A deux mètres j'arrive à savoir s'il y a quelque chose devant moi – ça fait comme une masse blanchâtre diffuse au lieu du vide marron. Je me limite à 10 mètres, mais ça plonge bien plus... Le tour est un véritable labyrinthe: des failles, des arches, des murs de glace soudain devant, derrière, dessus et dessous. Tout concours à désorienter: des chapelets de bulles arrivent d'en-bas, la fine terre rouge est tantôt déposée sur les petits replats – s'envolant en un tourbillon ocre à la moindre turbulence – tantôt figée derrière quelques millimètres de glace cristalline, tout bouge et s'exprime bruyamment. Et c'est sûrement le plus impressionnant: des gargouillements, des clapotis, des pétillements, le bruit de la rivière qui chante sur les galets dont je n'arrive pas à rattraper le nom (une récompense à qui trouve avant moi), et surtout ça claque avec une puissance surprenante – j'en sens parfois la pulsation dans ma main caressant l'invisible épiderme ondoyant.
Sensations exacerbées par la plongée seul, qui me rappelle à la conscience de ma petitesse/de l'immensité du monde, et qui oblige à rester ancré à l'intérieur de soi, attentivement à l'écoute de la petite voix.
Quand l'inflateur de la stab' devient difficile à saisir de mes doigts engourdis, je termine mon vol et remonte vers le monde lourd.

vendredi 20 août 2010

Dog race - hundeløp

































Un chien pour un vélo, et une pause-bière obligatoire à mi-parcours. Pour libérer la bête en soi...
(Pour raisons diplomatiques je n'ai pu courir - mais j'étais de l'équipe logistique)

dimanche 15 août 2010

Seconde couche

















Partagé entre la joie de voir la neige tomber et l'appréhension d'un hiver qui commencerait maintenant... (D'après les habitués c'est au moins un mois trop tôt quand même)

jeudi 12 août 2010

Un coup d'blanc c'est idéal

Un jour et une nuit de neige - le bout des doigts qui picote, et l'été qui déjà semble tirer à sa fin...

vendredi 6 août 2010

Une semaine

Jeudi: pour les faire sortir du village avant leur départ, j'emmène 2 journalistes allemands pour un tour au front du glacier.


















Vendredi: dans la soirée le ciel se découvre, les couleurs du monde se réchauffent, et je vois la lune pour la première fois depuis mon arrivée ici.




























Samedi: « Bar duty ». En compagnie de 2 autres permanents du village je m'affaire derrière le bar jusqu'à 3h du matin – l'occasion de saisir le sens de l'expression « ivre comme un polonais », le navire national de recherche scientifique en milieu polaire étant au port pour la nuit. Une expérience unique d'échanges interculturels!


Dimanche: départ en fin d'après-midi pour le Zeppelin Peak, perché 600m au-dessus du village - randonnée-varappe le long d'une arête affutée et friable, et retour par le glacier.




























Lundi: premier essai des skis nautiques. Pas aussi évident que ça n'en a l'air, la combinaison de survie induisant un tirant d'eau non-négligeable, éprouvant pour les avant-bras. A travailler...



Mardi: du soleil, pas de vent: un temps rêvé pour une première plongée. Alors que je prépare les affaires après le diner Sébastien m'appelle pour me dire que les bélougas sont au port! J'y cours, et arrive juste pour les voir s'éloigner... Je retourne à mes préparatifs, nous chargeons la voiture, allons au port, et les bélougas sont de nouveau là, sur le trajet du retour. Nous les regardons passer, chargeons le bateau, et prenant la mer remarquons qu'ils sont regroupés à l'entrée d'une lagune... Nous approchons lentement le bateau, coupons le moteur à 200m d'eux, et observons – au bout de 10 minutes ils se rapprochent, et soudain c'est une cinquantaine de baleines blanches qui nous entoure! Nous enfilons palmes et masque et nous glissons à l'eau pour une grosse heure de magie pure: les bélougas pêchent, ils sont excités et chantent, cliquètent et lâchent des chapelets de bulles dans un bouillonnement d'écume... L'eau trouble ne permet pas de les voir nager, mais ils sont très peu farouches et s'approchent tout près!
Comme un rêve d'enfant, avec les mains dans le frigo.


















Mercredi: 15 minutes après le saut du lit je suis sur le bateau en combinaison de survie, sur le départ pour une heure en mer: 3 scientifiques hollandais partent pour la journée cueillir des champignons au fond du fjord. L'air iodé réveille doucement le regard, les puffins planent à la proue du bateau, et les vagues clapotent contre les icebergs – à chaque fois je pense à ceux dont la journée de boulot commence par le métro ou les embouteillages...